Les photos HDR

Dans un précédent article, je vous ai présenté quelques photos de Singapour. La légende de certaines indiquait la mention HDR (High Dynamic Range). J’avais entendu parlé de cette technique depuis quelques mois, sans m’y être réellement intéressé. Certaines photos a très fort contraste que j’avais ramené du voyage était l’occasion de faire des essais de cette technologie. Je vous livre ici les résultats de mes premiers essais.

Les photos HDR

Principe

La plage de dynamique est l’étendue des tonalités, des basses aux hautes lumières

  • d’une scène, ou d’un sujet,
  • qu’une pellicule ou qu’un capteur est capable d’enregistrer.

Le problème souvent rencontré est que l’étendue dynamique des scènes que l’on souhaite immortaliser, est bien plus importante que celle que nos pellicules ou nos capteurs sont capables d’enregistrer. Nous obtenons alors

  • un décor correctement exposé, avec certaines zones (comme le ciel) cramées ou blanches,
  • un arrière plan bien exposé, mais un premier plan complètement bouché, sombre, ou noir.

Scène d’origine
Scène d’origine

L’image précédente est typique d’une scène a très forte amplitude de luminosité: ici le ciel est cramé a droite, et le bâtiment est globalement trop sombre.

Le HDR, High Dynamic Range en anglais, Imagerie à grande gamme dynamique en français, consiste a combiner plusieurs clichés de différentes expositions pour obtenir une image dont la plage dynamique est plus importante que celle de chacun des clichés. Cette technique permet d’obtenir des images plus détaillées, sans zones sur ou sous exposées.

La plupart des formats d’images numériques codent les pixels en utilisant 8 bits par couleur (3 x 8 = 24 bits par pixel). Les images HDR vont beaucoup plus loin, en proposant 24, 32 bits par couleur (ou plus), ce qui conduit a des images qui peuvent atteindre 96 bits par pixel, ou plus.

Mais avec ce codage, les images HDR ne sont pas exploitables: leur dynamique va au-delà de ce que les équipements (écran, imprimante) savent afficher. Il faut donc convertir l’image HDR en une image affichable, en redescendant le nombre de bits par pixels (à 24 bits/pixel par exemple). Cette opération s’appelle le Tone Mapping.

Le processus de création d’images HDR est donc le suivant:

  1. Alignement des photos a assembler,
  2. Création de l’image HDR à partir des images initiales,
  3. Phase de Tone Mapping: Construction d’une image «exploitable» à partir de l’image HDR précédente.

Pour obtenir une photo qui peut ressembler à cela:

Photo après traitement HDR
Photo après traitement HDR

Application

Hors processus créatif spécifique (voir paragraphe sur ce sujet un peu plus loin), la technique du HDR permet de compenser les très gros écarts de luminosité:

  • Paysage avec ciel couvert et lumineux (qui rend sombre le reste de la scène),
  • Photo d’architecture, avec les mêmes contraintes (bâtiments sombres, mais ciel lumineux),
  • Photo de nuit, avec ciel sombre, et scène fortement éclairées.

Les images obtenues peuvent ressembler aux prises de vue avec fill-in, sauf que dans ce cas, il n’y a plus de limites liées à l’éclairage du flash !

Cette technique n’est pas applicable dans les cas ou la scène comporte des éléments en mouvement. J’ai tendance a dire également que le HDR ne devrait pas être utilisé, là ou les contraintes de luminosité de la scène peuvent être compensées par une technique purement photographique (fill-in, flash, filtre polarisant, filtre gris-neutre …). Les résultats obtenus directement seront toujours meilleurs que les résultats obtenus par traitement HDR.

Création d’une image HDR

Regardons concrètement les étapes de création d’une image HDR.

La prise de vue

La technique consiste d’abord à prendre plusieurs clichés avec des expositions différentes. L’ensemble des trois clichés doit couvrir la plage de dynamique de la scène. Le plus simple est de prendre une photo sous-exposée, une photo avec une exposition moyenne, et une photo surexposée.

Trois vues d’expositions différentes
Trois vues d’expositions différentes

Il est important de comprendre que seule l’exposition doit changer. Si vous utilisez les automatismes de votre boîtier, il est possible qu’entre deux clichés, ceux-ci changent d’autres paramètres, comme la balance des blancs par exemple. De même, pour faire varier l’exposition, le boîtier fera varier le temps de pose, l’ouverture, ou les deux en même temps. Hors, faire varier l’ouverture peut être dangereux, car vous pourrez avoir des variations de profondeur de champ entre les clichés.

L’idéal est donc

  • De se placer en mode M (manuel) ou Av (priorité ouverture),
  • D’utiliser ensuite les fonctions de décalage d’exposition, soit manuelles, soit automatiques (braketing),
  • De prendre les photos en RAW, ou de désactiver toutes les fonctions de traitements de l’image,
  • d’utiliser un trépied pour éviter les décalages entre les clichés.

Alignement et création de l’image HDR

Cette phase est très souvent automatisée:

  • Le logiciel vous demande de choisir les photos,
  • Vous choisissez éventuellement quelques paramètres d’assemblage,
  • Le logiciel effectue l’alignement des clichés, et le traitement HDR

Le résultat affiché est très souvent illisible ou très fade. Lors des premiers essais beaucoup d’utilisateurs s’arrêtent à ce niveau, en considérant que la technique ne marche pas (ou qu’ils ne savent pas l’utiliser). Effectivement, le résultat, à ce stade est souvent très laid, simplement parce que l’image est codée en HDR (>= 96 bits/pixel), et que nos écrans sont incapables de l’afficher correctement.

Résultat du traitement HDR
Résultat du traitement HDR

A ce stade, nous n’avons effectué en fait, que la moitié du traitement. Nous ne verrons le résultat qu’après la phase de Tone Mapping.

Tone Mapping

Cette phase convertie donc l’image HDR, en image visualisable. L’opération consiste a abaisser le codage des pixel à 24 bits par exemple. Le Tone Mapping n’est pas une étape complètement automatique, et s’effectue en plusieurs cycles de création/visualisation. L’utilisateur fera varier les paramètres du logiciel utilisé, jusqu’à ce qu’il obtienne l’image souhaitée.

Photo après traitement HDR
Photo après traitement HDR
Résultats avec d’autres paramètres
Résultats avec d’autres paramètres
Résultats paramètres poussés
Résultats paramètres poussés

Comme vous pouvez le constater, les résultats obtenus peuvent beaucoup varier en fonction des paramètres. Trop pousser les valeurs conduira également à des artefacts comme le halo que l’on aperçoit autour du bâtiment.

A noter également, que j’ai pris les trois clichés sans trépied: la phase d’alignement des trois images a donc été très efficace.

Avantages et inconvénients

Les avantages sont évidents: la technique HDR permet de compenser les problèmes de dynamiques des capteurs de nos boîtiers numériques. Sur une scène à fort contraste, il nous suffit de prendre plusieurs clichés en s’arrangeant pour que, chaque zone de la scène, soit correctement exposée sur au moins un des clichés. Nous n’avons donc pas de choix, ni de compromis à faire lors de la prise de vue, et nous bénéficions, après traitement, des nuances disponibles sur l’ensemble des clichés.

Lorsque le logiciel est bien fait, les opérations sont quasiment toutes automatiques, nous pouvons donc obtenir de bons résultats, en quelques minutes, et sans effort.

La technique n’est pas sans inconvénients:

  • Le premier (le plus souvent cité), est le côté non naturel du résultat obtenu: beaucoup de photos HDR sont identifiables du premier coup d’oeil, à cause de leurs tons assez particuliers,
  • L’idéal est d’utiliser un trépied pendant les prises de vues, pour éviter les problèmes de décalage. Même avec des algorithmes d’alignement performants, les logiciels ne savent pas forcement les compenser. La photo HDR nécessite donc un minimum d’anticipation, et de préparation,
  • Après quelques essais, je ne retrouve pas le piqué des photos originales (mais peut-être que je ne maîtrise pas encore suffisamment les outils),
  • Le traitement génére du bruit plus ou moins important selon que le traitement est poussé ou non.

Comme nous venons de le voir dans le paragraphe précédent, l’étape cruciale est le Tone Mapping. L’aspect non naturel des images HDR dépend en très grande partie de cette étape, que le photographe devra donc apprendre à maîtriser s’il souhaite obtenir les tons qu’il souhaite.

Retouche/Assemblage ou HDR?

Mes premiers essais de HDR (il y a 2 ou 3 ans) se sont soldés par un échec. Je ne suis jamais parvenu à obtenir des photos suffisamment naturelles pour être intéressantes. Du coup, je me suis concentré sur la technique classique de retouche (superposition / masquage).

Les dernières tentatives me font changer d’avis. Si le logiciel est performant, la technique HDR est plus aisée, et le résultat final est plus «naturel». Je m’explique:

  • Le travail est plus aisé, parce que les logiciels automatisent bien le processus (notamment l’alignement). La retouche par superposition et masquage est, en général, assez longue, demande de la minutie,
  • Lorsque le «Tone Mapping» n’est pas trop poussé, le résultat est plus naturel en HDR qu’avec une retouche. Les transitions entre les niveaux d’exposition sont en effet plus progressives.

A titre d’exemple, voici la photo du fameux palais de justice, modifié avec la technique du masquage:

Assemblage et masquage
Assemblage et masquage

ainsi qu’une photo prise de nuit, obtenues avec les deux techniques:

Merlion obtenu par HDR
Merlion obtenu par HDR
Merlion obtenu par assemblage/masquage
Merlion obtenu par assemblage/masquage

HDR comme outil créatif

Jusqu’à présent, j’ai parlé de HDR, comme d’un outil technique, pour compenser de grand écarts de luminosité. Mais rien empêche d’utiliser cette technique pour accentuer certains tons, et obtenir des ambiances particulières. L’outil n’est plus au service de la technique, mais devient un outil créatif.

Encore une fois, tout se joue au niveau de l’étape du Tone Mapping. En poussant un peu les curseurs, il est assez facile d’obtenir des photos dont l’ambiance est beaucoup plus dramatique que les photos originales.

La photo ci-dessous vient de la section retouche du forum Passion-Photo (le site n’existe plus):

Utilisation créative du Tone Mapping - Image de JackD du forum Passion-Photo
Utilisation créative du Tone Mapping - Image de JackD du forum Passion-Photo

Je vous invite a regarder les photos HDR de cet auteur (JackD) qui montre une très grande maîtrise de cette technique.

Petit retour d’expérience

Ma petite expérience montre

  • qu’il est inutile de travailler avec plus de 3 ou 4 photos. Au-delà les logiciels commencent à avoir des problèmes d’alignement, et surtout lorsque l’on regarde la contribution de chacun des clichés, nous pouvons voir, assez rapidement que 3 clichés prédominent toujours: les extrêmes et le médium. Je pense qu’il faut d’abord maîtriser la technique avec trois photos, avant d’aller au-delà,
  • que plus les écarts de luminosité sont importants, moins le résultat obtenu sera naturel.
  • qu’il vaut mieux anticiper le traitement HDR, en utilisant notamment un trépied, qui minimisera les décalages entre les photos, et qui vous permettra de jouer plus librement avec le braketing.

Conclusion

Cet article n’est qu’une très brève présentation de la technologie HDR. Les liens donnés en référence vous permettront certainement d’aller plus loin, et de voir combien le domaine est vaste. Avec les progrès des algorithmes de traitement, et de l’ergonomie des logiciels, je pense que l’imagerie HDR deviendra de plus en plus accessible, donc populaire. Elle est, en effet, assez facile à maîtriser, et beaucoup plus rapide finalement, que la retouche par superposition/masquage utilisée habituellement. Lorsque la phase de Tone mapping donnera des rendus plus naturels, tout le processus pourra même être embarqué dans les boîtiers, qui pourront fournir directement des photos construites à partir de séries de clichés. Je pense que les boîtiers disposent déjà de la puissance nécessaire pour le faire. Ils manquent peut-être encore d’une mémoire suffisante.

Je présenterai, dans un prochain article, les outils permettant de générer des images HDR.

Références

Commentaires